La Société d’astronomie canadienne fut fondée en 1971, mais ses racines remontent presque un siècle avant cela. Dans le Canada du dix-neuvième siècle, les sociétés scientifiques étaient rares et petites, et principalement dévouées à l’histoire naturelle et à la géologie. Les scientifiques physiciens étaient en nombre réduit, et pas intéressés par la recherche académique. En 1882, Lord Lorne, alors Gouverneur-Général, encouragea l’organisation de la Société Royale du Canada, pour regrouper les scientifiques les plus éminents du Canada. D’ici les années 1890, la section sciences physiques de la Société Royale avait enrôlé les quelques hommes impliqués dans l’astronomie : C.H. McLeod de McGill et les astronomes-arpenteurs du Département de l’Intérieur, W.F. King, O.J. Klotz et E.G.D. Deville. Durant la même période, la Société royale d’astronomie du Canada (SRAC) – formée comme un club d’amateurs à Toronto en 1867 – émergea comme la seule organisation astronomique du pays. Avec l’établissement de l’Observatoire du Dominion, inauguré en 1905, un nombre d’amateurs et de professionnels suffisant fut atteint pour former le second centre de la SRAC à Ottawa.
En 1899 fut fondée la société d’astronomie et d’astrophysique d’Amérique (devenue plus tard la Société américaine d’astronomie, AAS en anglais). McLeod fut l’un des premiers membres, et C.A. Chant et J.S. Plaskett commencèrent à assister aux réunions de l’AAS à partir de 1906 et 1907, respectivement. Chacun allait devenir un membre éminent de la société. Plaskett, en particulier, amena nombre de ses collègues de l’Observatoire du Dominion (et plus tard de l’Observatoire astrophysique du Dominion) à ces réunions. Jusque dans les années 1950, les canadiens restèrent très en vue dans l’AAS, occupant des fonctions administratives et siégeant dans des comités, tout en donnant de nombreuses présentations lors des réunions annuelles. Plusieurs réunions de l’AAS, à commencer par celle d’Ottawa en 1911, ont été tenues dans des villes canadiennes.
Jusqu’à la seconde guerre mondiale, le nombre d’astronomes professionnels canadiens était encore très réduit. À cette époque plus que jamais, la SRAC fournissait un débouché aux professionnels. Ceux-ci avaient toujours un rôle important au niveau national et dans les centres locaux. C.A. Chant, qui forma la plupart des astronomes de l’avant-guerre à Toronto, édita le journal de la SRAC et son guide pratique d’observation pendant des décennies. Ainsi, la SRAC était unique parmi les sociétés d’astronomie nationales, regroupant amateurs et professionnels sous un seul toit.
Après la seconde guerre mondiale, l’astronomie canadienne se développa lentement. En plus des deux observatoires optiques nationaux, l’Observatoire du Dominion et l’Observatoire astrophysique du Dominion, des instruments de radio-astronomie apparurent dans les années 1960: la station de l’Observatoire du Dominion, l’Observatoire d’astrophysique radio du Dominion, et l’Observatoire radio d’Algonquin du Conseil national de la recherche (CNR). Le CNR supportait aussi la recherche en astrophysique de laboratoire et en science des météores. L’Observatoire David Dunlap de l’Université de Toronto, doté du deuxième plus grand télescope réfracteur du monde lors de sa fondation en 1935, était la seule installation universitaire d’importance et le seul centre de formation d’étudiants diplômés en astronomie. À cette époque, les astronomes canadiens avaient plus de chance de croiser leurs collègues aux réunions de l’AAS, ou à celles de la Société d’astronomie du Pacifique ou de l’Union Radio-Scientifique Internationale (URSI).
George Ellery Hale, le fondateur des observatoires de Yerkes et du Mont Wilson (et le père de l’observatoire du Mont Palomar), a involontairement contribué à l’organisation des astronomes canadiens. J.S. Plaskett était l’un des grands admirateurs de Hale, et quand ce dernier fonda l’Union astronomique internationale (UAI), Plaskett s’assura que le Canada soit l’une des premières nations adhérentes. Dès le début des années 1920, le Canada, par l’intermédiaire de l’Observatoire du Dominion (OD), fut un membre actif, avec ses astronomes siégeant dans plusieurs commissions de l’UAI. Chaque nation adhérente avait un Comité national, même si, en pratique, le travail du comité était effectué par l’OD. Durant les années 1950 et 1960, Carlyle Beals, alors astronome à l’OD, envisagea un rôle plus large pour le Comité national canadien (CNC). Grâce au financement fédéral, les réunions du CNC commencèrent à attirer plus que juste les membres des comités : un astronome en vue, souvent américain, venait donner une allocution, parmi d’autres présentations d’astronomes canadiens. Évidemment, les astronomes d’organismes gouvernementaux étaient les plus présents.
La SRAC s’était agrandie, et commençait à tenir ses propres réunions nationales annuelles, mais ces réunions ne s’orientaient pas vers les sujets professionnels comme les réunions de l’AAS. De nombreux astronomes canadiens publiaient dans le journal de la SRAC, mais ce n’était pas le journal faisant autorité pour la plupart des professionnels. Avec l’arrivée des années 1960, les programmes universitaires en science se multiplièrent rapidement, et des groupes et départements d’astronomie apparurent à travers le pays. Les astronomes universitaires, en particulier les jeunes hors des grandes villes, n’avaient pas les moyens financiers d’assister régulièrement aux réunions du CNC. Le manque de contacts fréquents et d’une tribune pour débattre des orientations futures de l’astronomie canadienne sont des facteurs ayant contribué à l’abandon du projet de télescope Reine Elizabeth II, en 1968. Un autre stimulant en faveur d’une meilleure organisation fut la réduction du nombre de joueurs institutionnels. En 1970, le gouvernement canadien ferma l’Observatoire du Dominion et transferra son personnel et son équipement au Conseil national de recherche du Canada (CNRC).
Le CNRC avait, pendant plusieurs années, formé des comités associés dont les membres étaient puisés dans les laboratoires du conseil, dans l’industrie et dans le monde universitaire, pour discuter de domaines de recherche spécifiques. Avec la consolidation de l’astronomie gouvernementale, un comité associé d’astronomie fut alors créé; ses membres étaient, en fait, les mêmes que ceux du CNC. Un sous-comité de ce groupe, constitué de Vic Hugues de l’Université Queen, Michael Ovenden de l’Université de la Colombie-Britannique, et Robert Roeder de l’Université de Toronto, proposa la création d’une société professionnelle d’astronomie. Il estima qu’une telle société pourrait attirer au départ entre 100 et 150 membres – nombre qui s’avéra juste dans les faits (liste des membres fondateurs). Lors de sa réunion à Victoria en mai 1971, le comité associé du CNC accepta cette recommandation et élut un conseil de sept personnes. Helen Hogg, de Toronto, fut nommée première présidente, avec Peter Millman, du CNRC, comme secrétaire inaugural. On considère cette rencontre comme la réunion fondatrice. La première réunion officelle eut lieu à l’Université de Toronto en novembre de la même année.
Pendant les premières années, la Société d’astronomie canadienne (CAS en anglais, son acronyme bilingue, CASCA, vint plus tard) s’employa à forger sa crédibilité parmi sa propre clientèle. Les premiers membres réalisèrent l’importance d’informer et de conseiller le gouvernement sur les besoins de la profession, mais ce n’est que plus tard qu’un tel mécanisme de conseil émergea. La CASCA n’avait pas de journal officiel – bien qu’elle rendait compte de ses activités dans le journal de la SRAC – et informait ses membres via un bulletin périodique. Alan Batten, de l’Observatoire astrophysique du Dominion, deuxième président de la CASCA, commença à distribuer d’occasionnelles brochures. David DuPuy, à St-Mary, suggéra un bulletin plus régulier. Cassiopeia fut ainsi fondé, avec DuPuy et Jack Heard de l’OAD comme co-rédacteurs. Plus d’une centaines d’éditions trimestrielles parurent avant que le bulletin, nommé selon les solstices et les équinoxes, ne soit remplacé par une version électronique.
Avant que la Société ne soit formée, les astronomes canadiens étaient très impliqués dans l’AAS. Une fois que la CASCA eût grossi en nombre de membres et en complexité, les canadiens s’investirent davantage dans leur propre organisation, bien que plusieurs assistent encore aux réunions américaines. L’organisation et le format des réunions se développèrent selon des lignes familières aux membres de l’AAS. Les séances de présentations orales devinrent plus longues et plus formelles, comparées aux premiers jours du CNC. Des séances plénières et de posters furent introduites, ainsi qu’une série de prix et un éventail de comités. Contrairement à son homologue américaine, la CASCA ne tient qu’une réunion annuelle, faisant des allées et venues à travers le Canada, même si le conseil d’administration (appelé ainsi après son incorporation en 1983) se réunit plus souvent.
Lors d’une période de réduction des dépenses, le CNRC mit fin à ses comités associés, dont celui d’astronomie. Le Comité national canadien de l’UAI, cependant, demeura intimement lié à la CASCA; le conseil tient lieu de CNC. Les espoirs de la CASCA de pouvoir conseiller le gouvernement portèrent fruit avec la mise sur pied du Comité consultatif de l’Institut Herzberg d’astrophysique, la division astronomique du CNRC. Le sondage de la profession par la CASCA pour établir une liste de priorités a culminé dans sa récente participation au travail de l’équipe de planification à long terme.